monsieur le curé en patois et en Français

L'Incora


E faut pas min volé, y est pas kè dévoè pas vos u dire, d'ni sé pas, lo vieux m'lon jamé dê.
Y était tout dè sti flanc du Saimno, y était tout uto du lé u onke intrè Sevri et San Fariou.
P'têtre bin, d'nin sé pas d'plè. Pas mé kinta saison y était ! …
Mais tcheu de sli couté y avait un Incora qu'était ass brâve. Kè St-Pierre u St José. Pas malin pé dou sous alté pa facheu d'gogne, to l'tin contin ; é ronnave jamé et borlave onke moins et to l'monde l'âmâvon bien.

Monsieur le Curé


Il ne faut pas m'en vouloir, ce n'est pas que je veux vous le cacher, mais je ne sais pas où ça s'est passé. Les vieux ne me l'ont jamais précisé.
Etait-ce sur ce flanc du Semnoz ? Etait-ce autour du lac ? ou encore entre Sevrier et Saint-Ferréol ?
Peut-être bien, je ne sais rien de plus. J'ignore aussi en quelle année c'était.
Mais sûr, dans ce secteur, il y avait un curé qui était aussi bon que Saint-Pierre ou Saint-Joseph. Sans la moindre méchanceté, très humble, toujours content. Il ne se plaignait jamais, se fâchait encore moins et tout le monde l'aimait bien.

Pe bailli la parmichon dê travailli la dminjhe, pè fére gras lè dvindre, é dzivè jamé k'nan. Et, sute, kan é fallait s'confessâ p'les grandès fétès, é fassait bon fére altè pas corrieux..

Pour donner la permission de travailler le dimanche ou, pour faire gras le vendredi, en cas de nécessité, il ne disait jamais non. Et, surtout, quand il fallait se confesser à l'occasion des grandes fêtes, avec lui c'était très facile, car il n'était pas curieux.
Y était pas kmin kâkè michnéres k'sont corrieux k'min onna bellta. E vulont to savait, é vo tiront los pius d'la tête.
Onna coup k'vos étes dien l'confechnére, p'in sourti, y est jamé schamna, é vos étraillont pé k'les boyandires kan é font la boye.
Il n'était pas comme certains confesseurs qui sont curieux comme une belette, qui veulent tout savoir, qui vous cherchent les poux sur la tête.
Une fois que vous êtes entré dans le confessionnal, pour en sortir ! … ce n'est jamais terminé, ils vous "brossent" pire que les lavandières qui font la lessive.
Alo itiè, los corieux mischnéres é font lourde. E borlons é parlons te fo, et to s'le k'sont d'vant l'confeschnère écuton et intindon te, attant i ptâ su l'almanach Vermot ! … Cré nom, itiè é va plê ! …
E vaut mieux n'tron vieux Incora.
Al pas corrieux mé onco, al cheu, cheu k'mon topain.
Alors là … ces graves confesseurs s'énervant, haussant la voix, parlant tout fort et les personnes qui attendent leur tour devant le confessionnal écoutant et comprenant tout ! … autant y publier sur l'Almanach Vermot ! … Vraiment, ça n'allait plus ! …
Avec votre vieux curé, c'était bien mieux.
Non seulement il n'était pas curieux, mais encore, il était sourd, sourd, comme un pot.
Alo, avoé s'li z'itié, p'sè confessâ é va te solè, k'min on papi a mosique. E faut fére bujhi l'groin, armoi les potes k'min les vasches, kè ronmont e l'pourre schordré ké comprègnive rin, dzive, quand les potes s'arrétavont d'bujhi :
"y est bon, passe d'latre flanc" après avai bailla 2 Pater et 3 Avé pé pénitince et on bon coup d'absoluchon
.
Avec lui, pour se confesser, ça allait tout seul, comme sur un papier à musique. Il suffisait de faire remuer les mâchoires, bouger les lèvres, comme les vaches quand elles ruminent et ce bienveillant sourd, qui ne comprenait rien, disait, quand les lèvres s'arrêtaient de remuer :
"c'est bon, allez, passez de l'autre côté", après avoir imposé deux "Pater" et trois "Ave" comme pénitence, il donnait l'absolution.

Mes braves jhins ! … Tout qu'vo voli d'plet ! …
Quand d'vo die, te l'monde âmâvè bien n'tron vieux Mr l'Incora ! … Te l'monde était contin ! … To ! …
Portant y a d'coup y était l'Incora, sin s'plaindre qu'fassait la pôte.
La dminjhe après la granda messe to los paroissiens éton modâ, les fennes à leu bronzin, los hommes u kâfé, l'Incora, to solè, contave los sous d'la kliète.
Oh ! .. d'pice y in avait preu, mé rinquè d'prin sous ! E fassè pas pesant ! … Suto qu'a sli timp, lo prin sous y était d'pice qu'étont parfia u mintin, avoé ou grou golet.

Quand d'vo die kien n'avait pas pesant ! …

Mes braves gens, que voulez-vous de plus ? ….
Comme je vous le redis tout le monde aimait beaucoup notre vieux Monsieur le Curé !…Et tout le monde était content ! … Tous ! …
Pourtant, il y avait des fois où c'était Monsieur le Curé lui-même, qui sans se plaindre, faisait la grimace.
Le dimanche après la grand'messe, quand tous ses paroissiens étaient partis, les femmes à leurs marmites, les hommes au café, le curé tout seul en sacristie, comptait les sous de la quête.
Oh, les pièces, ça pouvait aller en nombre, mais ce n'était rien que des petits sous … ça ne faisait pas lourd ! … d'autant moins lourd qu'en ces temps-là, les petites pièces étaient des pièces percées, avec un gros trou.
Alors croyez-moi, ça ne faisait vraiment pas lourd ! …

E fallait ptâ d'couté lo sous qu'allâvon a l'Evèché, lo sous pè l'Eglyise lo sous p'les schandelles, lo sous p'los âmes du Purgatoère, lo sous plo mischnéres, lo sous d'on flanc...

lo sous d'latre, e restave juste on bocon d'peuffe, kakè prin sous a pinne p'aschtâ d'tabac a prizi p'la smanne, onco les preize fallait pas les férè trop grousses, atramin lè d'vindre la tabatire était ass'voéde konna bornale.

Et il lui fallait mettre de côté les sous qui allaient à l'Evêché, les sous pour l'entretien de l'église, les sous pour les chandelles, les sous pour les âmes du purgatoire, les sous pour les missionnaires, des sous d'un côté, des sous de l'autre …
Il restait juste un peu de "poussière", quelques malotrues pièces à peine suffisantes pour acheter un peu de tabac à priser pour la semaine … Et encore, les prises, il ne fallait pas les faire grosses, autrement le vendredi, la tabatière était aussi vide qu'un sac percé.
N'tron vieu Incora, s'est dzive :
"Mo paroissiens, s'le sacré "piche prin", faudra les sacoure onna mite", e sont preu larghe mais lamin larghe d'épaule ! … Uvri l'pourta monia pé fotre d'sous dien, e va preu, mé p'les sourti, ni compta pas …."
Notre vieux curé se disait en lui-même :
"Mes paroissiens, ces sacrés "pisse petit", il faudra que je les secoue un peu ; ils sont larges, mais seulement d'épaules. Ouvrir le porte-monnaie pour mettre des sous dedans, ça va très bien, mais pour en sortir, n'y comptez pas …".

La dminjhe après, l'Incora a fé on sarmon su la charitâ, vo povi mè craire, mieux kon Jésuite u tin d'carimme a Notre-Dame de Paris.

Le dimanche suivant, le curé fit un sermon sur la charité, vous pouvez me croire, mieux qu'un jésuite, au temps de carême à Notre-Dame de Paris.

E faut savait, s'l'Incora, quand é volè, e prèjhive bien, y était onna "groussa sarvalle" apoé, avoé la linguè qu'armoivè preu ! …
Sti jhe a s'est dépatia dè schâmnâ la messe, p'alla compta lo sous d'la kliète
.

Il faut savoir que cet humble curé, quand il voulait, prêchait très bien, c'était une "grosse cervelle" avec une langue agile ! …
Ce jour-là, il s'était dépêché de finir sa messe, il avait hâte de connaître le résultat de la quête.

Te comptâ, vo povi mè craire, lo sous, lo prin sous, pas ion d'plet qu'la dminjhe avant. S'li grand sarmon su la charita, rin, é serre a rin, pa mé kè pschi dien on violon p'lè férè rélâ ! …

L'brave Incora a schin qu'los nié l'font sarra les dins, l'bouschon la corgnule ! …
"S'le fotu schin, s'la binde d'cacassês é vulont rin intindre" s'est dzive l'pourre homme. Y a l'Incora qu'est scheu, mais s'la varna d'rauffian é s'bouschon les orlliès.
Mé dminjhe kvin, faudra les fotre onna grousse borlaison, faudra to lo arbatâ, Cré nom ! … Et va fére lourde, é vont m'intindre s'ti coup ! ..
Mais dou, trai jhe après, la colére était bomba, l'Incora s'est dzive :
Rin dire, y est tcheu, s'le regnafu, é s'foton d'mê …

Le compte fait, et … refait : des petits sous, pas un de plus que dimanche dernier !
(Ces foutus chiens), cette bande de constipés ne voulaient rien entendre. Le curé est sourd c'est sûr, mais ces vauriens, c'est pire, ils se bouchaient les oreilles.
Ce beau sermon sur la charité ? Rien ! Il n'a servi à rien ! … Autant pisser dans un violon pour le faire chanter. Le brave curé sentit ………… ses ………. qui se serrent et sa gorge qui s'étrangle.
Dimanche prochain, décide le prêtre, ils vont m'entendre, je m'en vais les secouer, je vais hurler sacré nom, ça va faire "vilain" … Mais deux ou trois jours après, la colère tombée, le curé se disait :
Ne rien dire ? C'est sûr ces avares se moquent de moi …
On brave sarmon, é vulont pas comprindre !
Onna grousse borlaison ? Y est pas d'scheu ké fasse mieux ; a trop les sacoure s'le borrique sé armnyivont pas a la messe, é sarait onco pis …
A savait plé k'fére.
Onna véporna, qua paletave son corti, a pinsave a s'ké povè férè pé k'la kliètè saillè moins primme, kiè kakè grou sou non pas d'prin sous …
Mé kè férè ? …
Te pron coup, kmin on élouide ke l'passe p'la tête ! …
Noè ma fè … Vatia s'ké faut fére ! …
Un beau sermon ? Ils ne veulent rien comprendre !
De bruyants et vigoureux reproches ? Ce n'est pas certain que ce soit mieux ; à trop "secouer" ces bourriques, ils ne viendront plus à la messe, ce sera encore pire …
Le pauvre homme ne savait plus à quel saint se vouer.
Un après-midi, tout en bêchant son jardin, il cherchait une idée, un moyen pour que la quête soit un peu moins minable, qu'il y ait quelques "gros" sous parmi les petits ….
Mais que faire ? …
Et tout d'un coup, c'est comme un éclair qui lui traverse la tête !.
"Oui ma foi … Voilà ce qu'il faut faire ….. Mais bien sûr ! …

La kliète, yorre, y est les gosses los infants de chœur qu'la font, et bin y est mè kè d'la farè ..
Dépoé la chaire, avant l'sarmon al annonce to fo, un levin los brés :

"Ujhordui, y est l'Incora kva fére la kliète, d'min vé passa a couta vos".
Après l'sarmon, a prin onna grande cavagne, bien iente, (é vaut mieux, on sâ jamé), kè d'mans dévotè ont recovrait d'onna drola nappe a dentelles.

Alo, to brossu, a passe dien to los bancs, d'vant to los hommes, totes les fennes in les arguettin to drai dien los jus, in s'arrettin a schakon et in fassin sagrola et snailli la cavagne d'vant leu groin.

La quête, jusqu'ici, ce sont les enfants de chœur qui la font. Et bien, désormais, c'est moi-même, le curé qui la ferait ! …
Le dimanche suivant, il monte en chaire et avant le sermon, il annonce tout haut, en levant les bras :
"Aujourd'hui, c'est notre curé qui fera la quête, c'est moi qui passerai parmi vous".
Après le sermon, il prend une grande corbeille, profonde (il vaut mieux, on ne sait jamais) que des mains dévotes ont recouverte d'un beau napperon tout brodé, plein de dentelles.
Puis, cérémonieux, il passe dans tous les bancs, devant tous les hommes, devant toutes les femmes, en les regardant droit dans les yeux, s'arrêtant devant chacun, en secouant la corbeille et en faisant tinter les sous devant leur nez.
Vo povi mè croire, y est la vréte vartâ, to l'monde, on pta la mandien la cavagne … Pas ion qu'a pas pta la man ! …
Ah ! l'Incora est contin, to contin. E pinse "Fére mé même la kliète y était onna bonna marouille ! … Fotus mâlabotia, d'vos é avu" … !

Ass, tellamin dépatia dé schmna la messe qu'a la oublia l'Pater ! …
Oh, après to … m … din dré deux d'man, é fara du méme …
La messe est schamna … Amen … Ite missae …

Alors là, vous pouvez me croire, c'est la vérité vraie ! … Tout le monde, sans exception, a mis la main dans la corbeille. Pas un, qui n'eut pas fait le geste ! Et Monsieur le curé est content .. .. Heureux, il pense : "faire moi-même la quête, c'était donc une bonne idée". Foutus, mal éduqués, cette fois je vous ai eus ! …"
Il est tellement pressé de finir sa messe qu'il en oublie le Pater … "Après tout … mer ..! j'en dirai deux demain pour compenser. Amen. Ite, Missa est …"
La messe est terminée.

Vite, ala pas l'tin d's'est désablyi, a renverse la cavagne su la trable. Oh ! sti coup on drai kia on moé d'sou. Portant a fourse d'comptâ. Le moé d'sous dévin décressu ! … et suto, pa onna groussa pice ! …

Et quand al a to compta, oh, doux Jésus, Marie, Josè, étou possible pas on sou d'plet ke l'atrè dminjhe mé pas on maltru sou d'plet.

Itiè, A dè s'achtâ, les schambes qu'est crulont, la tête qu'est vire, al a kmin onna pire dien l'estome, a s'est schin tot éboélâ ! …
Achta, al réstè longtin ! … la tête dien les doè mans …

De retour à la sacristie, il ne prend pas le temps de quitter ses habits sacerdotaux, vite, il renverse la corbeille sur la table. Il lui semble que le tas de pièces en vrac est plus gros que d'habitude …
Il se met à compter, en séparant les pièces. A mesure qu'il compte, le tas de pièces décroît bien vite et, surtout pas un seul "gros sou".
Et quand il a terminé, hélas ! Il faut se rendre à l'évidence … Ah, doux Jésus, Marie, Joseph, pas un sou de plus que d'habitude. Alors là, il doit s'asseoir, les jambes tremblantes. La tête "lui tourne" et il a comme une grosse pierre sur l'estomac ; il est anéanti ! …
Assis, il reste longtemps, la tête entre les mains, immobile, silencieux ..!
 Et tot pron coup a s'est rappalè in fassin la kliète qu'al a compta tote les jhins qu'éton a la messe. Et yorre, su la trable, y a moins d'pice. Kè d'participant a la messe. Et …… portant, to, to ' on pta la man dien la cavagne.

Alo sé dinse, y est tcheu, y in à kon pta la man, sin rin bailli ! …

N'tron vieux Incora, s'live to drai kmin Lucifer dien l'aigue bènète. Alta mêtia fou, lo 4 pieux to drai su la tête …. Nom de D …..Et su l'mu, juste d'van lui le pourre homme vè le Bon Diu su la Croê …

 Et tout d'un coup, il se souvient qu'en faisant la quête, il avait compté le nombre de participants à la messe. Et maintenant sur la table, il s'aperçoit qu'il y a moins de pièces que de personnes à l'office. Et pourtant tous les fidèles, tous, sans exception, ont mis la main dans la corbeille.
Donc, c'est sûr, certains ont mis la main, ont fait le geste sans rien donner ! …
Notre vieux curé se lève tout droit, tel Lucifer, dans l'eau bénite, fou de colère, les quatre cheveux qui lui restent, droits sur la tête.
Hors de lui … Nom de D …., les bandits …
Sur le mur, en face de lui, le pauvre homme aperçoit le Christ sur la Croix ! …
 Oh ! doux jésus, pardon, faut pas m'in volè mé sti coup y est trop ! … d'en poè plet ! …
Ubin d'mode de s'la paroésse. Ubin d'les maille l'eau a s'le schins.

Rin bailli a la kliète, y est pas bien mais fére simblant et rin pta onna vergogne ; y est onna binde d'voyou, d'mintieu, d'sin keu é vâlon moins qu'on schin inradia ! …

Et l'malhéreu Incora, to solet kmin job a la corgnule sarrâ, kmin son l'avè invartollia l'cou avoé onna riute.

E pu rin bdie, rin bère, rin ké vu deschèdre, juste onna bonna râchon d'gotte, et dé tote la vé é n'pu pas fromâ los jus ! …

Sli jhe itiè a poé le lindeman altè tellamin effarollia k'al avait rin pu avalâ

 Oh ! bon Jésus, pardon, il ne faut pas m'en vouloir, mais cette fois, c'en est trop ; je n'en peux plus ! …
ou bien je quitte cette paroisse,
ou bien, je tords le cou à cette bande de vauriens.
Ne rien donner à la quête, ce n'est pas beau, mais faire semblant et ne rien mettre dans la corbeille, c'est une honte, la vergogne, la traîtrise absolue ! Une bande de voyous, de menteurs, des sans cœur qui valent moins qu'un chien enragé ! …
Et le malheureux, seul comme job, sent la gorge serrée, comme entouré d'un lien. Il ne peut ni manger, ni boire ; rien ne veut "passer", juste une bonne ration de "goutte" ; et de toute la nuit, pas un seul instant il n'a pu fermer les yeux ! …
Ce jour-là et le lendemain, il était tellement contrarié qu'il n'avait absolument rien pu avaler !
 D'vos é preu dê kè Mr l'Incora était un brave homme, sin rognafe, et ké kmin l'Evangile savè pardonna.
Dien la smanne, la colère était modà, et la dminjhe après al a fé son sarmon ! … Avant d'fére la kliète.
Dèpoé l'songeon d'la chaire, kmin l'pape su la lôghe d'St-Pierre, a dzivè :
 
Je vous ai dit que Monsieur le curé était un brave homme, sans méchanceté, sans rancune et que suivant l'évangile, il savait pardonner. Alors, pendant la semaine, la colère l'avait quitté et le dimanche suivant il a fait son sermon …
Puis, avant de faire la quête, du haut de la chaire, de bonne humeur, mais sûr de lui, sérieux comme le Pape au balcon de Saint-Pierre, il ajouta :
Grand Diu d'lénau, d'si to heureux, to contin, grand marsi d'mavai pto dien s'la paroésse yeu y a rinkè d'braves jhins qu'ont bon keu.
Cré nom, vo m'intendi, vo m'écutâ tiè d'ze, vo dromsi ?
Quant d'vo diè, kè partiè, y a rinkè d'braves jhins, ass généreux kè St-Martin, ka bailla son manté ?"
 
"Seigneur, Grand Dieu du Ciel, je vous remercie de tout cœur de m'avoir confié cette paroisse où je suis heureux, au milieu de braves gens, désintéressés, généreux, pleins de bonté …
Cré nom, la-dessous, m'entendez-vous, quand je dis que "par ici il n'y a que des gens bons et généreux à faire pâlir Saint-Martin lui-même qui a donné son manteau ?"
 Oh alo, itiè, tos los paroissiens s'est font gonfla l'pêtre, tcheu kiè vré, y est l'Incora kia dè.
E sont to fié ! …

L'Incora dit : y est vré dien la paroesse y a rinké d'braves jhins, dié preu viu dminjhe passâ kan dé fé la kliète, vo i to bailli kakrin, Grand marci à to ;
S'lo kon pas ballia onna pice et l'on fé s'ké povont élon ballia au moins … Le Golet.

 Alors là, tous les paroissiens dressent la tête, gonflent la poitrine, tout fiers ; sûr que c'est vrai puisque Monsieur le Curé lui-même le dit. Et Monsieur le Curé poursuit :
"Il est vrai que dans cette paroisse il n'y a que des braves gens. Je l'ai très bien constaté dimanche lorsque j'ai fait la quête. Vous avez tous donné quelque chose. Grand merci à tous, à toutes ; quant à ceux qui n'ont pas donné une pièce, ils ont fait leur possible … Ils ont au moins donné …….. le trou".

Auteur de ce récit : Henri GURRET

Transciption : Monique LAMY